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Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vous, demandez ce que vous voudrez, et cela vous sera accordé (Jean 15:7)

La prière est à la fois un moyen de s'unir à Christ et un fruit de l'union avec lui. Comme moyen de s'unir à Christ, elle est d'une importance infinie. Tous les mouvements de l'âme, tous les élans de la foi, ses désirs, ses aspirations, trouvent leur expression dans la prière. Le croyant qui prie, entre en contact avec Jésus; et celui qui persévère dans ses supplications jusqu'à ce qu'il soit exaucé, jusqu'à ce qu'il soit mis en possession de la bénédiction après laquelle il soupire, trouve dans ses prières un moyen puissant de demeurer plus complètement en lui.

Mais ce n'est pas tant comme moyen que comme fruit de la vie en lui, que le Sauveur parle de la prière dans la parabole du cep et des sarments. Il ne voit pas seulement dans la prière un moyen d'obtenir des bénédictions personnelles, il y voit une des principales forces dont nous disposons pour mettre le monde entier au bénéfice de la rédemption; et il nous assure que si nous demeurons en lui, nous serons autant d'Israël, vainqueurs de Dieu et des hommes. Nos prières seront l'intercession du juste, fervente, efficace, puissante comme celle d'Elie en faveur du peuple idolâtre. De telles prières seront le résultat de notre vie en Christ et produiront beaucoup de fruits.

Pour le chrétien qui ne demeure pas pleinement en Christ, la prière rencontre parfois des difficultés assez grandes pour le priver de la consolation et de la force qu'il devait en retirer. Sous prétexte d'humilité, il se demande comment une créature aussi indigne que lui pourrait influencer le Dieu tout-puissant et sage. Ces questions angoissantes sont épargnées à celui qui demeure véritablement en Christ; il fait de plus en plus l'expérience que ses prières ne sont entendues et exaucées que grâce à son union avec le Christ. Parce que nous sommes un avec lui, nos prières montent à Dieu comme ses propres prières.

En effet, en demeurant en Christ et en gardant sa Parole, nous apprenons à prier selon la volonté de Dieu. Notre volonté propre étant domptée, nos pensées, nos désirs naturels s'effacent devant les pensées et les désirs de Christ; son Saint-Esprit pénètre tout notre être; et, sans que nous sachions comment, nos voeux rendus conformes à la volonté de Dieu grâce au souffle divin, peuvent recevoir leur accomplissement; notre volonté étant renouvelée et sanctifiée, nous pouvons demander librement ce que nous voulons, et cela nous est accordé.

Puis la communion de Christ nous enseigne à ne rechercher que la gloire de Dieu dans nos prières. Jésus promettait d'exaucer ses disciples, afin que le Père soit glorifié dans le Fils (Voy. Jean XIV : 13). Dans sa prière sacerdotale, nous voyons que cette gloire a été son but sur la terre (Jean XVII); dans le ciel, c'est encore sa grande préoccupation. Celui qui demeure en lui est gagné par ce désir, et la gloire de Dieu devient sa pensée dominante. D'abord, cette pensée, en maîtrisant l'âme, la porte presque à craindre de nourrir un désir de peur qu'il ne se trouve pas être à la gloire du Père. Mais une fois cette suprématie acceptée, elle devient une puissance qui élève le coeur, l'élargit, le rend capable d'embrasser le vaste horizon de cette gloire, et de dire avec le Fils : « Père, glorifie ton nom ».

De plus, si nous demeurons en Christ, nous pouvons nous prévaloir avec assurance du nom de Christ. Souvent les croyants essaient, en priant, de penser au nom de Jésus et à ses mérites, cherchant à se persuader qu'à cause de lui, ils seront exaucés, bien qu'ils sentent péniblement leur peu de foi en ce nom. Ils n'agissent pas au nom de Jésus et ne veulent s'en servir que pour prier; mais la promesse : « Tout ce que vous demanderez en mon nom », ne peut être séparé du commandement : « Tout ce que vous faites, faites-le au nom du Seigneur Jésus ». Si le nom de Christ doit être entièrement à notre disposition, de telle sorte que nous puissions en user librement, cela ne se peut que si nous-mêmes, tout d'abord, nous nous sommes entièrement livrés à lui, et qu'il dispose librement de nous. C'est la vie en Christ qui donne le droit et la possibilité d'user de son nom avec assurance. Le Père ne refuse rien au Fils. Si nous demeurons dans le Fils, nous venons au Père, comme ne faisant qu'un avec lui; sa justice nous couvre, son Esprit est en nous, le Père nous voit dans le Fils et nous accorde notre requête. Ce n'est point par une sorte de compromis que le Père nous considère comme étant en Christ, sans que nous y soyons réellement. Il faut que le Père nous voie vivre en lui, pour que nos prières le fléchissent. Non seulement la vie en Christ transforme notre volonté de manière à ce que nos prières soient conformes à l'esprit de Dieu, mais encore elle nous impute la vertu toute-puissante des mérites de Christ.

Demeurer en Christ produit aussi en nous la foi qui seule obtient l'exaucement. Selon la règle du royaume des cieux, il nous est fait selon notre foi. « Croyez que vous recevrez et il vous sera accordé ». Cette foi a ses racines dans la Parole de Dieu; mais il y a en elle quelque chose d'infiniment plus élevé que cette conclusion logique : puisque Dieu a promis, j'obtiendrai. Etant un acte spirituel, la foi repose sur la Parole qui demeure en nous comme une puissance de vie, et par conséquent elle dépend de notre état intérieur. Sans jeûne et sans prières (Marc IX : 29), sans humilité et sans spiritualité (Jean V : 44), sans l'obéissance de l'amour (1 Jean III :22), il ne peut y avoir de foi vivante. Mais l'âme unie à Christ, qui voit combien lui seul rend ses prières acceptables, ose, par cela même, compter sur l'exaucement. Par la foi elle a appris à demeurer en lui; et cette loi a eu pour effet d'augmenter sa confiance en tout ce que Dieu promet d'être et de faire pour elle. Elle croit toujours plus fermement que ce qu'elle deman­dera en son nom, elle le recevra.

Enfin, en Christ, nous sommes à la seule place où la réponse peut nous être accordée. Que de chrétiens implorent ardemment la bénédiction de Dieu; et quand Dieu vient à eux pour les bénir, il ne sait pour ainsi dire pas où les prendre; ces chrétiens-là ne se doutent pas que la réponse aussi doit être attendue et reçue dans la prière. C'est en Christ qu'elle nous est donnée; hors de lui, l'exaucement risquerait d'être mis au service de nos voluptés (Jacq. IV : 3). Les meilleurs exaucements du reste, comme le don de la grâce ou de la force pour travailler et faire le bien, ne nous viennent que sous la forme d'une expérience croissante de ce que Christ peut être fait pour nous de la part de Dieu.

Demeurons en Christ, et nous apprendrons, ce que tant d'âmes ignorent, que le secret de la prière de la foi est la vie de la foi, la vie en Christ seul.

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